Des milliers de dockers mènent actuellement un bras de fer avec les exploitants afin de revaloriser leur salaire et améliorer les conditions d’exercice de leur profession. De nombreux ports sont déjà touchés et la gronde ne semble pas faiblir. Quelles sont les causes de ce mouvement et quelle est son étendue ? Quelles sont les perturbations à prévoir sur la chaîne d’approvisionnement ?
Le point sur la situation actuelle
Depuis début juin 2023, des dockers ont commencé à débrayer dans des ports de l’ouest des États-Unis. Une quinzaine de jours plus tard, 7000 dockers canadiens de l’International Longshore and Warehouse Union (ILWU) ont voté à plus de 99% une grève contre les exploitants portuaires de Colombie-Britannique, la province la plus à l’ouest du Canada.
Des ralentissements ont été constatés dans différents ports d’Amérique du Nord, dont ceux de Long Beach ou Oakland. Le port de Seattle a été fermé, car les dockers sont en confrontation avec la Pacific Maritime Association (PMA). L’organisation ne leur propose en effet qu’une augmentation de 1,56 $ par heure, soit une majoration bien en dessous de l’inflation.
Comprendre les causes de ce mouvement social
Les dockers américains luttent notamment pour obtenir une part plus importante des bénéfices générés par les exploitants du transport maritime. Au cours des deux dernières années, les compagnies maritimes et les exploitants portuaires ont en effet réalisé 500 milliards de dollars de bénéfices. Pourtant, malgré l’inflation, les salaires des dockers n’augmentent que très faiblement.
Citons aussi les 22 000 dockers qui travaillent aux États-Unis sans contrat depuis plus d’un an maintenant…
Enfin, la profession a par ailleurs été frappée de plein fouet par la pandémie de la Covid-19, car les dockers, essentiels au commerce international, ont dû continuer à travailler malgré les risques.
Ces tensions ont fait éclore des de nombreuses grèves dans le monde entier. D’après Crisis24, une agence de conseil maritime, au moins 38 manifestations ou grèves majeures ont eu lieu en 2022, soit un chiffre multiplié par 4 entre 2021 et 2022.
Quelles sont les conséquences de cette lutte des dockers ?
Une grande majorité du commerce mondial passe par les ports. Les mouvements sociaux de la profession ont donc toujours un impact notable. Ainsi, le 9 juin 2023, la valeur totale des marchandises bloquées en Californie, dans l’Oregon et dans l’État de Washington s’élevait à 5,2 milliards de dollars. Ce chiffre devrait croître étant donné que les ports de la côte ouest des États-Unis génèrent près de 2000 milliards de dollars, soit environ 9% du PIB des États-Unis.
Cette situation pourrait avoir aussi un impact au niveau international avec un effet sur la chaîne d’approvisionnement qui pourrait à terme avoir un effet sur les taux de fret. De plus, les ports américains sont utilisés pour transporter l’aide médicale et militaire vers l’Ukraine. Tout blocage pourrait donc avoir un effet, au moins partiel, sur l’approvisionnement de l’armée ukrainienne.
Face à cette situation, l’Association des employeurs maritimes de la Colombie-Britannique déclare qu’elle souhaite “reconnaître l’expertise de la main-d’œuvre du secteur et veiller à ce que les ports de la côte ouest restent compétitifs.”
Aux États-Unis, une entente de principe a déjà été annoncée suite à des négociations ayant réuni l’ILWU, la PMA et l’administration Biden. Cet accord porte sur un nouveau contrat de 6 ans couvrant les dockers de l’ensemble des ports de la côte ouest.
Espérons donc que les parties prenantes réussissent à trouver un terrain d’entente. Des tensions à long terme pourraient être dévastatrices sur le commerce mondial et pourraient aussi inciter les exportateurs à privilégier les ports de la côte est et ceux du golfe du Mexique.